Un air de liberté !

par Marie-Pauline Mollaret

Il court dans la compétition 2023 de courts métrages un air de liberté et parfois de révolte.

Joyeusement libertaire, Boléro de Nans Laborde-Jourdàa affirme la puissance de l’art comme moteur ultime d’une révolution hédoniste. La saison pourpre de Clémence Bouchereau met en scène - avec toute la délicatesse permise par la technique animée de l’écran d’épingles - une communauté de fillettes vivant libres dans une forme de paradis originel. Dans Via Dolorosa de Rachel Gutgarts, autre film d’animation au noir et blanc somptueux, se dévoile un portrait punk et contrasté de la ville de Jérusalem. Carrément provocateur, Le Crocodile de Dawid Bodzak prend quant à lui à bras le corps la question de la violence dans une œuvre qui ne cherche pas à être aimable.

Le sens du combat anime les personnages de Contadores de Irati Gorostidi Agirretxe, qui rejoue un épisode fondamental de l’histoire politique basque, dont les termes continuent de hanter les mobilisations contemporaines, et traverse le fulgurant documentaire d’archives Arkhé d’Armando Navarro qui se bat contre l’oubli. Faisant un pas de côté, Walking With Her Into the Night de Hui SHU met en scène un singulier duo qui est moins engagé dans une lutte frontale que dans une forme de résistance insouciante et joyeuse face à l’inéluctable.

De son côté, Prava Istina priče o šori de Andrea Slaviček bouscule les codes de la narration pour réinventer le teen movie, saveur très acidulée, alors que Corps scintillants de Inês Teixeira propose une variation ultra sensible autour du coming of age en interrogeant le trouble des relations - sentimentales comme amicales. Enfin, c’est la liberté (d’aimer, d’aller et venir, et même d’exister) qui est au cœur de la quête intense mais étrangement contemplative du personnage principal de Paradis de Morad Mostafa.

La séance spéciale fait se rencontrer les êtres et les solitudes, entre étrangeté, douceur et émotion.

La chanteuse et comédienne Jehnny Beth redonne le goût de vivre à Agathe Roussel dans Stranger, qu’elle cosigne avec Iris Chassaigne. Pleure pas Gabriel de Mathilde Chavanne est une comédie romantique moderne et contemporaine, aux punchlines d’anthologie, dans laquelle Dimitri Doré croise le chemin de Tiphaine Raffier. Quant à Midnight Skin, il signe le retour à la Semaine de la Critique de Manolis Mavris (découvert en 2021 avec Brutalia) pour un film de genre sophistiqué autour des métamorphoses et de l’isolement urbain.

La Semaine de la Critique continuera d’accompagner ces talents, en leur offrant l’opportunité d’intégrer son programme Next Step, un atelier de formation et d’accompagnement vers le long métrage.

Marie-Pauline Mollaret,

Coordonatrice du comité de séléction courts métrages