Pourquoi un « salon de beauté » à Gaza?
Ce salon de coiffure, ce décor que nous avons créé, avec ses couleurs, ses miroirs, représente notre vision de Gaza : un petit coin de paradis au milieu d’un terrible merdier.

Un « coin de paradis » figuré par un huis clos entre femmes?
Les femmes gazaouïes sont comme toutes les femmes du monde, même si leurs souffrances sont spécifiques ici. Pour changer quelque chose à Gaza, nous avons besoin des femmes. Elles sont des héroïnes parce que, malgré la guerre, elles sont du côté de la vie. Dans le film, la guerre se déclenche à l’extérieur du salon, mais les femmes continuent de se parler, d’aimer. Elles veulent être belles dans l’espoir d’un rendez-vous galant, d’un mariage… Alors que les tirs sont omniprésents, mettre du rouge à lèvres peut devenir une forme de résistance : rester « humain » malgré les circonstances, être du côté de l’espoir.

Dans quelles conditions avez-vous pu tourner le film?
Au début du tournage, en 2014, une nouvelle guerre s’est abattue sur Gaza. L’armée israélienne a tué des milliers de civils en trois semaines. A ce moment-là, nous nous sommes posé la question de notre sujet qui porte sur les conflits entre Palestiniens alors que notre peuple se faisait massacrer. Nous avons finalement décidé de le garder parce que le plus important pour nous était de parler de la vie. La mort est couverte par les médias qui ne se préoccupent pas de rendre compte de la vie quotidienne. En se concentrant sur un conflit interne aux Palestiniens, nous avons essayé de nous émanciper de ce qu’on attend de nous, cinéastes palestiniens. Mais notre volonté d’émancipation a une limite, celle de la réalité…