Soixante et un ans !

par Ava Cahen

Soixante et un ans que La Semaine de la Critique fait corps avec les jeunes cinéastes du monde entier, qu’elle visionne et projette leurs premiers films, longs et courts, qu’elle grandit avec les talents qu’elle voit grandir. Elle ne vieillit jamais La Semaine de la Critique, c’est tout le contraire. Elle peut rester éternellement jeune grâce aux réalisateurs et réalisatrices qui piquent son ciel. Des étoiles brillantes, pas filantes. Elles sont sur l’affiche imaginée par la photographe Charlotte Abramow, qui rend hommage au beau premier long métrage de Chloé Mazlo, Sous le ciel d’Alice. 

Sur l’affiche toujours, deux personnages se regardent. Ils se regardent, et tout devient possible. Nous avons été très attentifs cette année, avec les comités, à la question du regard justement. Ce qu’on attend d’un premier film, c’est qu’il nous surprenne, qu’il nous bouscule, qu’il affole nos sens et nos sentiments. Avec les premiers films, on se jette dans l’inconnu, on adopte un autre point de vue, on découvre des acteurs et des actrices, on rencontre de nouveaux personnages, enfants, adolescents, adultes, on traverse avec eux des épreuves, on éprouve de la joie, de la peine, de la peur. Ils nous donnent de la force, du courage et de l’espoir. La sélection reflète les couleurs de nos sentiments. Des mois durant, nous les avons tenus secrets, mais aujourd’hui, nous les libérons ! Il n’y a pas plus belle émotion que de partager avec le public les films que nous avons tant aimés, films dont nous avons été les premiers spectateurs, les premiers regards, discrets. 

Le tempo s’est imposé de lui-même au fil du visionnage, l’amour est le thème majeur de cette sélection. Il en est question dans la plupart des films : l’amour comme réponse aux crises, qu’elles soient existentielles, politiques, morales ou sociales. L’amour fraternel (Nos Cérémonies), maternel (When You Finish Saving The World), filial (Alma Viva), paternel (Aftersun, Goutte d’or, The Woodcutter Story), le sentiment amoureux (Tasavor, Tout le monde aime Jeanne), l’amour selon Dalva dans le film du même titre. Quant aux adolescents de La Jauria, ils en font un apprentissage tardif et sauvage.

Le film de clôture, Next Sohee, emprunte les chemins du polar pour dénoncer l’exploitation des jeunes (et surtout des jeunes femmes) à travers le travail précaire et la sous-traitance. Une fiction contemporaine palpitante mise en scène par July Jung, réalisatrice sud-coréenne qui sait croquer la nature humaine avec justesse et fougue.

La séance spéciale courts-métrages est une trilogie faite de bruit et de fureur. Elle invite à libérer les formes et les monstres, avec Scale, film d’animation de Joseph Pierce, Amo, film expérimental d’Emmanuel Gras et Hideous, film musical de Yann Gonzalez. La fièvre monte, et c’est le cinéma qui nous fait bouillir le sang et battre les tempes.

Nous avons chassé les trésors, nous avons trouvé de l’or.

Ruée vers Miramar !

Ava Cahen

Déléguée générale