Apre, troublant et totalement captivant, The Tribe pourrait bien vous laisser... sans voix.

Tout votre film est en langage des signes, sans voix off, ni sous-titres. Pourquoi avoir choisi de plonger le public uniquement dans ce langage corporel et gestuel ?
Il s'agit d'un hommage au cinéma muet, lorsque les acteurs communiquaient par le biais de la pantomime. Presque chaque année désormais on produit ce genre de films mais toutes les œuvres récentes que j'ai pu voir respectent la stylisation du cinéma muet. Or, mon objectif principal, c’était de réaliser un film muet plus réaliste, facilement compréhensible sans paroles. De nos jours, il y a beaucoup de longs métrages qu’il suffit d’écouter pour comprendre. Et d’un autre côté, il y a des films où les acteurs restent silencieux tout le temps. Mais là, avec The Tribe, j'ai trouvé un autre chemin. La langue des signes, c’est comme une danse, un ballet, ou du théâtre kabuki, mais sans aucun grotesque, car les gens communiquent comme ça pour de vrai.

En effet, vos jeunes acteurs sont sourds et muets. Mais votre film était-il concevable avec des acteurs entendants ?
A aucun moment, je n’ai envisagé de faire ce film avec des acteurs entendants. Le langage du corps est naturel et très personnel pour les personnes sourdes. Parce que les gens qui parlent utilisent les muscles faciaux pour prononcer les mots, tandis que les personnes sourdes, elles, utilisent tout leur corps pour communiquer.
Le casting de mon film a duré à peu près une année, surtout par le biais des réseaux sociaux. Nous avons examiné quelque 300 candidatures pour les rôles principaux. Aucun de nos acteurs n‘était professionnel. En fait, ce sont tous des enfants des rues. Je pense qu’avec ce tournage, ils ont acquis une expérience unique. Ce fut le cas pour moi en tout cas.